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« Aujourd’hui, on solde l’affaire » ? (1)

lundi 17 mars 2008   |   Christophe Ventura
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C’est par ces mots choisis que le premier secrétaire du parti socialiste (PS), François Hollande, s’est exprimé devant les journalistes après le vote des parlementaires (députés et sénateurs) réunis en Congrès à Versailles le 4 février. Celui-ci a permis l’adoption de la révision de la Constitution préalable à la ratification du traité de Lisbonne. Ainsi, la France va devenir le quatrième pays, après la Hongrie, la Slovénie et Malte, à « participer à l’Union européenne dans les conditions prévues par le traité de Lisbonne modifiant le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, signé le 13 décembre 2007. »


Ce coup de force des élus ( de ceux qui ont voté « oui » ou « abstention », respectivement 560 et 152 voix des 893 parlementaires présents), contre la souveraineté populaire sera lourd de conséquences dans la vie démocratique nationale et pour la légitimité, toujours plus écornée, d’une construction européenne qui se fait dans le dos des peuples. Si 11 référendums étaient prévus en Europe en 2005, seule l’Irlande, obligée par sa Constitution, soumettra cette fois-ci le traité jumeau du Traité constitutionnel européen de 2005 à sa population.


Partout en Europe, celles et ceux qui se battent contre le carcan des politiques de l’Union européenne doivent savoir en quoi la direction du principal parti de la gauche française tient une responsabilité particulière dans cette défaite de la démocratie. Avec 32 votes "pour", 142 abstentions et 5 « ne prend pas part au vote »(2), la gauche - en premier lieu le PS - a fourni les 40 voix nécessaires à l’obtention de la majorité requise (545 voix) pour adopter la révision de la Constitution et, ce faisant, a permis de confisquer la parole au peuple.


Si l’ensemble des parlementaires de cette gauche avait voté contre la modification de la Constitution, la minorité de blocage aurait été atteinte : 369 voix auraient été réunies (donc 6 de plus que les 363 requises pour atteindre le seuil de la minorité de blocage) avec les suffrages des 15 parlementaires dissidents de droite.


Il convient de saluer les 121 parlementaires du Parti socialiste qui, contre le choix hypocrite et revanchard de 2005 proposé par leur direction - l’abstention au Congrès et le « oui » à la ratification -, ont voté, plus nombreux que prévu, « non ». Mais les mots du premier d’entre eux constituent autant d’insultes à la démocratie dans notre pays.


Notre espoir est ailleurs. Il réside dans le peuple français dont toutes les enquêtes d’opinion ont montré depuis plusieurs mois que, malgré la pression médiatique et politique, il était favorable à un référendum sur ce traité. Tout comme d’ailleurs les peuples de nombreux autres pays d’Europe. Il réside également dans ces centaines de réunions publiques qui se sont tenues ces trois derniers mois, loin de l’agenda médiatique, dans les petites villes rurales comme dans les grandes métropoles. Il réside aussi dans la consolidation d’un front européen de forces sociales et citoyennes qui, chaque jour un peu plus, enracinent leurs combats contre les politiques de l’UE.
Il réside dans cette prise de conscience toujours plus partagée que
les " élites" et le système politique actuel sont devenus un frein à l’émancipation politique et sociale de l’ensemble des citoyens. Il réside enfin dans cette idée que le temps est venu de dépasser cette Europe réellement existante constituée par les traités de l’UE.


Alors, « aujourd’hui, on solde l’affaire » ? Non, le combat pour le respect de la souveraineté populaire ne fait que commencer.


 


(1). Propos de François Hollande dans Libération (05/02/2008) : http://www.liberation.fr/actualite/politiques/308089.FR.php


(2). Ces votes comprennent ceux du PS, du Parti radical de gauche et des Verts.





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