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Vingt ans après sa création, un nouveau cycle de la vie d’Attac ?

Par Bernard Cassen

lundi 4 juin 2018   |   Bernard Cassen
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Pour les organisateurs et les amateurs de commémorations, l’année 2018 sera un grand millésime. On y aura célébré le centenaire de l’armistice de 1918, les 60 ans de la Vème République, le cinquantenaire de Mai 1968, les 170 ans de la Révolution de 1848 et les 70 ans de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Et aussi les 20 ans d’Attac !

Rassurez-vous, je ne nous crois pas atteints de mégalomanie collective aiguë ni de fétichisme du chiffre 8 que les Chinois considèrent comme le chiffre porte-bonheur. Je pense en effet qu’il existe des logiques communes à toutes les commémorations. Elles sont d’abord des évocations d’un moment ou d’un événement passés visant à renforcer la cohésion d’un groupe. Mais elles peuvent également donner lieu à des réinterprétations et parfois des récupérations ou des manipulations.

Si Attac fête aujourd’hui ses 20 ans, ce n’est pas pour sacrifier à la facilité des chiffres ronds ni pour récupérer ou manipuler qui que ce soit. Au-delà du plaisir de nous retrouver si nombreux ensemble – par-delà nos différences et parfois nos différends – c’est d’abord, dans un contexte national et international délétère, l’occasion de montrer que notre mot d’ordre d’origine « Un autre monde est possible », n’est pas du rabâchage, mais une ardente obligation comme on disait autrefois.

Qui, il y a deux décennies, aurait pu imaginer qu’une association au nom à la fois bizarre et mobilisateur, et née du Monde diplomatique, serait toujours, vingt après, en première ligne, contre les ravages d’un capitalisme mortifère pour les humains et la nature. Dans la vie des organisations, notamment des organisations politiques, il y a des cycles : certaines disparaissent ou périclitent parce qu’elles ont perdu leur raison d’être, et d’autres, apparemment sorties de nulle part, prennent leur place. En témoignent les bouleversements intervenus ces dernières années, et même ces derniers mois, dans la vie publique en Espagne, en France et en Italie, pour ne citer que trois pays européens.

En 20 ans d’existence, Attac a connu des hauts et des bas, mais a su s’adapter aux nouveaux fronts de luttes et ainsi conjurer le risque de non pertinence dans le paysage politique et social français. Pour m’en tenir aux hauts, je dirai que cette association a joué un rôle décisif dans au moins deux événements historiques : la création, avec Le Monde diplomatique, du Forum social mondial (dont la première session a eu lieu à Porto Alegre en janvier 2001), et la campagne victorieuse pour le « non » au référendum du 29 mai 2005.

Un troisième « haut » est en train de prendre forme sous nos yeux. Je veux parler de l’initiative d’Attac et de la Fondation Copernic de réunir le 26 mai dernier plusieurs dizaines d’organisations associatives, syndicales et politiques pour combattre ensemble la dernière en date des incarnations du néolibéralisme décomplexé, à savoir le macronisme. Pour le mouvement social, accepter la présence des partis à son côté constitue un virage prometteur pour les luttes à venir. Pour Attac, c’est là une grande responsabilité et la perspective d’ouvrir un nouveau cycle de la vie de l’association.

 

(Ce texte reprend l’intervention de Bernard Cassen lors de la célébration des 2O ans d’Attac le samedi 2 juin 2018 à Paris.)

Photos : Brice Le Gall ©


 





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