La 18ème Rencontre du Foro de Sao Paulo, qui s’est tenue à Caracas les 4, 5 et 6 juillet, a rassemblé quelque 600 représentants d’une centaine de partis progressistes et de gauche de l’ensemble de l’Amérique latine et de la Caraïbe (dont certains au pouvoir dans une dizaine de pays), ainsi que des observateurs des autres continents. Parmi ces derniers, des délégués du Parti de la gauche européenne (PGE), dont son président, Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, et Jean-Luc Mélenchon, co-président du Parti de gauche et ancien candidat du Front de gauche à l’élection présidentielle.
Cette rencontre s’est tenue dans le contexte des manœuvres, ouvertes ou souterraines, de déstabilisation des gouvernements et dirigeants progressistes en cours dans la région depuis plusieurs années (Bolivie, Honduras, Equateur) et dont la dernière manifestation en date a été le coup d’Etat « constitutionnel » au Paraguay contre le président élu, Fernando Lugo. Mais c’est évidemment l’élection présidentielle du 7 octobre prochain au Venezuela – à laquelle Hugo Chavez est à nouveau candidat – qui, en Amérique latine, constitue le principal enjeu géopolitique des prochains mois.
De multiples signaux indiquent que le Département d’Etat et la CIA, relayés par les grands médias - notamment en Espagne et en France - s’activent pour diaboliser Hugo Chavez et pour promouvoir l’image du candidat de la droite, Henrique Capriles Radonski, présenté - sans rire - comme « social-démocrate », alors qu’il s’agit d’un représentant presque caricatural de l’oligarchie vénézuélienne. Comme elle l’a fait lors des scrutins précédents, l’opposition anti-chaviste, conseillée par des « experts » américains, dénonce par avance les fraudes que préparerait le gouvernement. Peu lui importe que, lors de ces scrutins – une quinzaine, parmi lesquels un seul perdu par Chavez - les nombreux observateurs étrangers, dont ceux de la Fondation Carter et de l’Union européenne, aient chaque fois conclu à la sincérité du processus électoral. L’objectif est de jeter le doute, de discréditer les mouvements de solidarité avec la Révolution bolivarienne afin de neutraliser toute réaction internationale en cas de troubles que pourrait provoquer une opposition n’acceptant pas sa défaite dans les urnes. Car telle est bien, en effet, la perspective dans laquelle elle se place actuellement.
A cet égard, la déclaration finale de la rencontre du Foro de Sao Paulo rappelle que « tous les sondages d’opinion indiquent clairement que l’avance du candidat Hugo Chavez sur le candidat de la droite dépasse les 20 points. Pour cette raison, la droite considère déjà comme acquise la victoire de Hugo Chavez. C’est pourquoi elle participe au processus électoral, tout en préparant les conditions qui lui permettraient de remettre en cause le résultat, ainsi que le Conseil national électoral. Face à cette situation, le Foro de Sao Paulo demande à toutes les forces progressistes et de gauche d’appuyer la démocratie vénézuélienne et de repousser toutes les tentatives de déstabilisation de la droite ».
Pour sensibiliser les opinions publiques et les mobiliser préventivement contre toute tentative de déstabilisation au Venezuela, le Foro a décidé de faire du 24 juillet prochain, 229ème anniversaire de la naissance de Simon Bolivar, une journée mondiale de soutien à la Révolution bolivarienne. Ce jour-là, comme l’a indiqué Valter Pomar, dirigeant du Parti des travailleurs (PT) brésilien et secrétaire exécutif du Foro, auront lieu dans les différents continents, et tout particulièrement en Amérique latine, des meetings, des cérémonies, des conférences de presse et des offrandes florales au Libertador. Et, hommage aux réseaux sociaux, un tuitazo (un « twithon ») mondial. Ceux qui entendaient mettre en place un cordon sanitaire autour du président vénézuélien en seront pour leurs frais…
Pour eux, le coup de grâce est venu de l’ancien président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva. On sait que son nom est régulièrement mis en avant un peu partout dans le monde (y compris au Venezuela) par les forces de droite qui ne veulent surtout pas s’afficher comme telles. Lula serait le bon exemple à suivre et Chavez le mauvais. C’est oublier que les grands médias brésiliens avaient mené une guerre sans merci contre l’ancien ouvrier de la métallurgie lorsqu’il avait brigué un second mandat. Ce qui ne l’empêcha pas d’être triomphalement réélu le 29 octobre 2006. Dans un message vidéo diffusé lors de la séance de clôture du Foro, le vendredi 6 juillet, et longuement applaudi par la salle debout, Lula a apporté le soutien total du PT et le sien propre à la candidature de Chavez : « Ta victoire sera notre victoire » a-t-il déclaré.
En décembre 2009, Le Monde avait distingué Lula comme « l’homme de l’année ». Compte tenu du statut mondial du dirigeant vénézuélien et de l’ampleur des forces internationales liguées contre lui, le quotidien aurait d’excellentes raisons – non pas idéologiques, mais journalistiques - d’en faire autant pour lui en 2012 s’il est reconduit à la présidence. Mais c’est peut-être trop demander…